samedi 10 février 2018

LE PIEGE DU BON PETIT SOLDAT

Il n'y a pas de bon petit soldat heureux

By Dave Meier in People 
J'ai 50 ans et cela fait 15 ans que j'ai été emportée dans une spirale infernale vers le fond. Parce que la vie a fait que je me suis retrouvée seule à devoir m'occuper d'une famille à épargner mes amours devenus fragiles et malades : un enfant et son père.
J'ai endossé le rôle de celle qui encaisse. Celle qui reste debout et qui doit être solide. Celle qui se sent responsable de tout, qui se sent seule et qui le reste.
Devoir rassurer les proches pour ne pas les voir paniquer, alors que l'on a envie de hurler "aidez moi! c'est horrible, ce n'est pas juste. Je ne sais pas quoi faire ..."

Je me suis faites moralement frappée par le monde médical, les enseignants, les autres parents d'enfants dit "normaux".
Par celui la même que j'avais porté à bout de bras, père culpabilisé d'être diminué, de ne pas savoir comment aider son fils, jaloux de passer après, puis par le poison qu'il a épousé par la suite.
Beaucoup de mes amis m'ont appréciée pour mon écoute , mon empathie et mon soutien. Le leur se résumait à un "ma pauvre, je ne sais pas comment tu fais! Tu es si courageuse..." Pour ceux d'entre eux qui n'ont pas déserté le paysage.
Je n'ai plus attendu que l'on m'aide, je me suis tellement épuisée que je les ai laissé m'en coller un peu plus sur le dos. Je n'avais même pas l'idée de trouver anormal que mon nouveau compagnon ne m'aide pas dans les épreuves douloureuses que la vie m'imposait.Ou même qu'il me laisse assumer ce qui était de sa responsabilité.
Un bon petit soldat, et je culpabilisais en plus. J'étais malheureuse, de plus en plus seule. Je me suis même convaincue que je ne méritais pas d'être aimée et soutenue. que quelqu'un prenne soin de moi, que j'étais un boulet; alors que c'était à moi qu'ils faisaient porter leurs valises.

Aujourd'hui je sais que c'est faux, et je m'en veux de ne pas avoir exiger mieux de la vie comme je me l'étais promis.
 Aujourd'hui je n'ai plus de temps, de patience, ni d'énergie.
A partir de maintenant je ne "résisterais" plus, je rendrais les coups. Moi et mon fils ne nous excuserons plus d'être trop ceci ou trop cela. Nous sommes vivants, génialement vivants même si nous avons du mal à trouver notre place. Parce qu'elle n'est pas bien grande celle qu'on nous laisse...
J'espère  reprendre le cours de ma vie à moi. Ne pas gâcher ce qu'il en reste et montrer à mon garçon combien la vie est belle et que c'est elle qui l' a fait tel qu'il est : Extra Ordinaire. Que ça vie le soit aussi, à sa mesure ou démesure.
Et merde à tous les NORMALISANT.
En même temps de belles personnes sont là et je suis heureuse de sentir leur lumière. Je leur dit merci.
Je veux voir, goûter, sentir, humer, cette terre et son temps.
Je veux peindre, dessiner, et marcher sur ce monde.
Je veux sentir à nouveau mon corps vivant et pas seulement retenu,  arc bouté, et douloureux.
Alors à tous ceux qui devienne l'aidant, l'accompagnant d'un proche malade, handicapé, ou simplement trop atypique pour rentrer dans les cases, je dis attention! Ne vous laissez pas enfermer dans ce rôle. N'encaissez pas. Ne vous effacez pas et demandez de l'aide, exigez la s'il le faut. Nous ne sommes coupable de rien, et nous ne sommes pas moins à protéger et à soutenir que celui qui est fragile et dont nous nous occupons.
Personne n'a le droit de vous juger. Ce n'est pas normal d'être à part et oubliée. 
Messieurs sans vouloir faire de généralité, prenez soins de celle à qui vous laissez très souvent le poids du quotidien des soins , des rendez-vous médicaux, psy., des "tribunaux " scolaires et des réflexions en familles. Si vous voulez qu'elle reste votre femme alors n'oubliez pas d'être pleinement père. Pour le meilleur et pour le pire.

Voilà, il me fallait le déposer quelque part. Il n'y a pas de bon petit soldat heureux.